lundi 7 septembre 2009

CAFE DES IMAGES - HEROUVILLE SAINT CLAIR

"Memory of Love"






"Memory of Love" :
dans les beaux quartiers d'Hongzhu, une singulière histoire d'amour

Extrait critique cinéma : " LE MONDE"  18.08.09 -

On répète (et déplore) suffisamment que toutes les histoires d'amour se ressemblent pour ne pas prêter attention à celle-ci, qui renouvelle le schéma traditionnel du trio mari-femme-amant de façon sensible et troublante.

Ils sont quatre personnages, impliqués dans ce scénario sentimental que l'on pourrait qualifier de pervers s'il n'était perçu d'un point de vue totalement bienveillant et romantique.

Wang Chao nous distille peu à peu les épisodes douloureux auxquels sont confrontés ces trois hommes et cette femme.

Une partie du charme de Memory of Love tient à sa construction élaborée, tissage de flash-back et de situations gênantes.

La belle Sizhu a séduit tour à tour deux jeunes chirurgiens de l'hôpital d'Hongzhu, sortes de Jules et Jim chinois : elle a été la petite amie de l'un, Qian Cheng, et elle a épousé l'autre, Li Xun.

En prologue, une jolie scène illustre ce que fut le dilemme de la jeune femme. En barque avec ses deux amis sur un lac, elle se laisse tomber dans l'eau, afin de choisir celui qui sera le plus prompt à la sauver de la noyade. Li Xun sera son Zorro.
Mais, pris par son travail, il délaisse Sizhu, sans se rendre compte que celle-ci mène une double vie avec un troisième homme. Un jour, un couple est amené aux urgences de l'hôpital, à la suite d'un accident de voiture. Il s'agit de Sizhu et de Chen Mo, son amant, professeur de danse latine au cours qu'elle fréquente depuis neuf mois.

Son époux Li Xun découvre alors qu'elle le trompe, et qu'elle est enceinte.

Il existe un vieux proverbe chinois qui dit :
"Fais un pas en arrière et tu verras un avenir plus clément."

Imbibé de philosophie bouddhiste, Wang Chao donne une leçon de sagesse conjugale. On peut dire sans déflorer l'intrigue que l'époux fracassé (et d'une exemplaire maîtrise de ses nerfs) va faire preuve de tolérance, de pardon, d'examen de conscience. Le suspense n'est pas là, il est dans le comportement de Sizhu. Lorsqu'elle sort d'un coma amnésique de trois ans et se réveille, elle est, en quelque sorte, à l'époque du prologue. Elle s'apprête à quitter Qian Cheng pour Li Xun.
De pair, Li Xun réalise un fantasme (revivre les premiers temps d'une histoire d'amour) et rencontre une angoisse ("J'ai peur de l'avenir"). Après quelques quiproquos dignes du boulevard, entre lui et l'amant de sa femme, tout recommence pour lui : extases, mariage, preuves d'amour. Mais il agit avec une exemplaire probité morale, faisant revivre à sa compagne tous les moments qu'elle avait oubliés afin de l'aider à retrouver la mémoire. Jusqu'à la remettre en contact avec celui qui lui est devenu inconnu : le professeur de danse.

Sizhu retombera-t-elle amoureuse de Chen Mo ?
Avec qui sa passion s'octroiera-t-elle une seconde chance ?

Depuis son premier film bressonien, L'Orphelin d'Anyang, jusqu'à celui-ci, aux lancinantes images scandées par la Pavane pour une infante défunte, de Maurice Ravel, Wang Chao reste fidèle à une certitude : la nécessité d'affronter les vérités les moins confortables.

Qu'il peigne le sous-prolétariat avec ses prostituées ou la classe moyenne avec ses femmes intéressées, ses obsessions affleurent : impureté des sentiments, disparitions et mensonges.
Il illustre cette fois la face positive des comportements sociaux, en orchestrant fort subtilement le ballet de ses réminiscences (lac, mouchoir de tissu, épingle à cheveux, bracelet, photographies), l'opposition entre architecture urbaine et sites champêtres, le retour cyclique des sorties de tunnels, et les jeux de lumière, de moins en moins crépusculaires au fur et à mesure que l'idylle ressuscite.
Souvenir d'une soirée au Café des images d'Hérouville Saint Clair.
le 27 aôut 2009 avec Claude et Nicolas.